RPG Aberon-Silthrim avec John Slipmanson et Arya Séléna

Lorsqu'elle se réveilla,la première chose qu'elle vit fut le visage épuisé d'Osthato, éclairé par la lumière vacillante d'une bougie. Aussitôt, l'inquiétude s'empara d'elle.

Tu es blessé ?

Non...Mais toi, tu es sacrément mal en point. Chuchota-t-il en mouillant le linge qu'elle avait sur le front. Derrière lui se tenait un homme, manifestement un guérisseur, occupé à touiller dans un chaudron d'où émanaient des éffluves de thym.

Tu as trouvé l'antidote ?
Sa voix tremblait malgré elle. Sa respiration était presque revenue à la normale, et la douleur s'était estompée. Pourtant, elle savait que ce n'était qu'un leure. En tant qu'Elfe, elle connaissait beaucoup d'herbes, et elle savait que le poison qu'elle avait pris agissait ainsi, offrant un répit trompeur à sa victime avant de l'emporter définitivement. L'expression inquiète d'Osthato raviva sa peur. Elle l'écouta expliquer pourquoi c'était impossible d'aller chercher la fleur. Et son dernier espoir s'évapora comme une goutte d'eau solitaire sous le soleil brûlant du désert du Hardarac. Pendant quelques instants, seul le bruit du couteau du guérisseur hachant une plante et le bouillonement paresseux provenant du chaudron troublèrent le silence anxieux.

Il essaye de préparer quelque chose qui ralentira l'action du poison. Expliqua Osthato à voix basse pour ne pas déranger l'Elfe dans son travail.

Wyrda !

Les trois Elfes sursautèrent. Blagden se tenait sur l'appui de fenêtre, son plumage luisant sous l'éclat argenté de la lune. Arya croisa le regard d'Osthato, et tous deux pensèrent la même chose. Quelques instants plus tard, le corbeau volait vers une montagne solitaire, silencieux comme une ombre, comme un spectre annonçant le changement. Profondément soulagée, Arya se laissa retomber sur ses oreillers.La douleur commençait à remonter à la surface, mais la certitude que Blagden réussirait l'apaisait.

Tu devrais dormir un peu... conseilla-t-elle à son compagnon de voyage.

Elle avait chaud. Beaucoup trop chaud. La fraîcheur du linge posé sur son front n'était plus qu'un souvenir. L'Elfe soupira, se résignant à passer une nuit désagréable. Elle chercha la main d'Osthato et la serra brièvement pour le rassurer autant que pour se rassurer. Ses oreilles parvinrent à capter un son, de très loin, presque éffacé.

Wyrda !

Osthato entendu également le cri de Blagden, mais il vu une nette image de l'oiseau, affolé, se cachant dans un trou. Grognant, Osthato fit parvenir cette image à Arya et s'enfuit sans attendre sa réponse. Coinçant sa dague entre ses dents, il siffla. Un grand faucon aux plumes rouges sang arriva vers lui, Osthato lui offra son bras en prononçant quelques phrases en ancien language. Osthato disparut, il sentit une drôle de sensation, puis quand il rouvrit les yeux sa vue fut plus perçante encore que la vue des elfes, il était le faucon. Prenant Teigling et son fourreau dans le bec, il s'envola droit vers la forêt qui couvrait la montagne maudite.

Cela faisait maintenant une heure qu'Osthato planait au-dessus de la forêt, quand il l'aperçut, tremblant, en haut d'un grand hêtre. Blagden reconnu son esprit et vola droit sur lui, il était tétanisé mais il l'avait entre ses pattes, la fleur d'arc-en-ciel. Osthato se désunifia du faucon en lui ordonnant de ne pas s'éloigner. Il fallait qu'il parle à l'oiseau. Quelques minutes suffirent pour le réconforter, l'oiseau reprit son chemin vers la maison du guérisseur, restant tout de même le plus haut possible pour s'éloigner de la forêt. Le faucon revenait vers Osthato, pressé lui aussi de repartir, quand un grognement se fit entendre. Osthato sortit vivement sa lame, tous ses sens en alerte. Plusieurs autres grognements se firent entendre. Ainsi vous voilà, murmura Osthato pour lui-même. A peine avait-il finit sa phrase qu'un loup géant se jeta sur lui. Osthato l'esquiva agilement et fit siffler sa lame au-dessus des oreilles du loup, comme un avertissement. Un loup au pelage grisonnant s'avança alors vers Osthato.

Que fais tu ici, elfe! Ce territoire est notre, c'est tout ce qu'on bien voulu nous laisser tes aînés, et ils ne reprendront cette terre que quand toutes nos carcasses giseront sur le sol! .

Je viens en paix, clama l'elfe, ces terres ne m'intéressent pas...Je suis venu chercher la fleur d'arc-en-ciel, pour sauver...

Un proche mourant, oui je sais! ricana le loup, si tu savais combien de fois j'ai entendu cela... Mais nous n'avons que faire de vos vies, elfes! Vous nous avez pourchassés, tués, torturés, et accrochés à vos murs en trophées! Cette montagne est à nous, les étrangers n'ont rien à faire ici et périssent sous nos crocs. C'est la loi.


Jurant, l'elfe vit le faucon s'enfuir, apeuré. Le chef des loups se jeta sur lui, tentant de lui arracher le bras. Osthato, furieux, le frappa du poing, l'envoyant contre un tronc. Deux autres loups arrivèrent à toute vitesse, l'elfe trancha la jambe du premier et fendit le crâne de l'autre en tournant sur lui même. Mais ils arrivaient, toujours plus nombreux, Osthato aurait donné n'importe quoi pour qu'Arya soit à ses côtés.

Retourne!

Mais...mais pourquoi? Bafouilla Blagden, sortant de son rôle habituel d'oiseau mystérieux et moqueur.

Retourne, oblige ce couard de faucon de retourner et fais-le partir avec lui! Ordonna-t-elle en insufflant dans sa voix l'inflexion royale qu'elle réservait aux chefs humains.

Mais...la fleur?

Je me fiche de cette fleur ! Je veux que tu ailles sauver Osthato!

Si je ne la rapporte pas, le poison va se répandre...

Si tu ne la rapportes pas, Osthato mourra ! Et tu finiras rôti dans mon assiette! Blagden, c'est en tant que Princesse de mon peuple que je te parle. Fais-le.

Elle le sentit hésiter, puis il répliqua: Je ne peux pas vous sauver tous les deux. Ton père m'a adopté, Arya, il a toujours écouté mes conseils, et il a toujours été bon avec moi. C'est au nom de cet amitié que je décide de te sauver, toi. Tu es l'héritière du trône des Elfes, il est important que tu vives.

Tu sais très bien que ce titre ne vaut rien. N'importe qui pourrait prendre ma place. Par tous les astres, Blagden, si tu ne vas pas sauver Osthato stante pede, il n'y aura plus d'héritière au trône du tout, et tu pourras assister à notre enterrement commun!

Cette dernière tirade avait épuisé toutes ses forces, et elle dut couper le contact mental qu'elle entretenait avec l'oiseau. Elle espérait de toutes ses forces qu'il l'écouterait. Comme s'il avait lu dans ses pensées, le guérisseur déclara:

J'avais quelques chevaux, avant, mais l'un d'eux est tombé malade et a contaminé les autres. Ils sont mourants, mais ils ont encore assez de force...La mort est l'un des plus beaux cadeaux qu'on pourrait leur donner. Même moi, je suis impuissant face à leur maladie...

Il faudra m'aider.

Sans poser de questions, il aida Arya à aller jusqu'à ses chevaux. Elle posa une main sur l'encolure secouée de frissons de l'un d'eux, et aspira sa dernière force vitale avec douceur. Elle sentit sa gratitude juste avant que la petite lumière qui le représentait ne s'éteigne.Elle recommença avec les autres, jusqu'à bourdonner d'énergie. Puis, avec toute la force dont elle était capable, elle lança son esprit hors de son corps douloureux, à l'assaut de la montagne aux loups. Elle trouva aussitôt l'esprit du chef de meute, et utilisa ses dernières forces pour le contrôler. Il se débatit avec haine, mais l'esprit du guérisseur se joignit au sien et ensemble ils parvinrent à le dominer. Puis, utilisant la voix du chef des loups, Arya déclara:

Assez, mes frères.

Les autres loups s'arrêtèrent, perplexes, leurs queues s'agitant encore furieusement sous l'impulsion de l'envie de vengeance.

J'ai lu dans le coeur de cet Elfe, poursuivit Arya, et je n'y ai vu que de bonnes choses. Il est notre ami. Tout celui qui le touche aura à faire avec moi. Et elle ajouta un grognement menaçant pour souligner ses propos.

Mais, Chef...

Mettriez-vous mon autorité en question? Et, à Osthato: File maintenant, Elfe. Tu n'auras pas cette chance deux fois. Et emporte cette maudite fleur avec toi! Il fallait que ce soit crédible...

Et puis, comme Osthato s'envolait en attachant son esprit à celui de Blagden, Arya revint bruquement à elle.Son échange avec Osthato n'avait fait qu'empirer son état. Respirant avec difficulté, elle fixa le plafond, son champ de vue obscurci par des taches noires qui finirent par l'emporter...Elle s'évanouit.

Etonné, Osthato regarda les grands loups se retirer en grognant de colère. Mais il reprit rapidement ses esprits et s'envola avec Blagden. Aprochant de la maison du guérisseur, il lança son esprit vers Arya pour évaluer son état. La voyant inconsciente il pressa Blagden d'entrer par la fenêtre et se transforma si vite que le guérisseur sursauta. Lui tendant la fleur, il s'empressa de le bombarder de questions.

Comment va-t-elle? Est-ce qu'elle respire? Suis-je arriver trop tard?


Elle respire faiblement, la plupart des victimes de ce poison meurent bien avant, mais elle s'accroche...

Le guérisseur mit la fleur dans une potion fumante qu'il finissait de préparer avant l'arrivée d'Osthato et la porta aux lèvres d'Arya en récitant quelques vers en ancien language.

Puisses tu guérir princesse, que la fleur redonne ses couleurs à ton coeur asséché...

Osthato s'installa sur le rebord de la fenêtre en regardant la lumière de la lune éclairer le doux visage de sa compagne, se préparant à une longue nuit. Tandis que le guérisseur commençait un air plein d'espoir à la flûte. La mélodie rendait Osthato nostalgique, et il revit son frêre, le sourire aux lèvres le jour de son mariage, lui qui était avant un enfant audacieux et ventard était devenu un homme bon, rayonnant et attentionné dès l'arrivée à Ellesmera de sa future femme. Se souriant à lui-même, Osthato repensa à leurs bagarres d'enfance, avant que leurs parents et leur soeur ne soient tués par des Kulls. La malchance avait fait qu'ils soient les deux derniers représentants de leur famille encore vivants, grand-parents, oncles, tantes, cousins... ceux qui n'étaient pas morts à la guerre avaient étés décimés par les urgals. Lors de ses bagarres, c'était toujours Osthato qui gagnait, aîné d'une demie dizaine d'années, mais Vanir était sûr de lui et obstiné, il revenait toujours à la charge quelques jours après. Osthato se rappelait le jour où son petit frère avait cassé une statue de bronze dans le temple, voyant sa frayeur, Osthato avait pris sur lui et s'était dénoncé à sa place, écopant d'une semaine à passer sans sortir de sa chambre et en ne mangeant que des légumes. Vanir lui était solidaire et lui lançait des baies et des sucreries elfiques par la fenêtre pour se faire pardonner. Une dernière scène revint à l'esprit d'Osthato, en pleine nuit, revenant à Ellesmera après des années de vagabondages sur les routes, il croisa Vanir, en armure légère, armé jusqu'au dents et une ceinture d'emmeraudes brillantes sous la quantité d'énergie qu'elles contenaient. "Que fais-tu ainsi paré mon frère? Est-il arrivé quelque chose?" lui avait demandé Osthato. "Tu comprendra en arrivant à Ellesmera, j'ai quelque chose de très important à faire et personne ne pourra m'en empêcher. C'est donc avec tristesse que je te dit au revoir quelques minutes après que tu sois revenu de tes dix longues années d'errance. Prend soin de toi mon frère, et que les étoiles veillent sur toi!". Vanir lui fait l'accolade et partit après qu'Osthato eut répondu à son salut, songeur. Osthato s'en était toujours voulu de ne pas l'avoir empêché de partir, car il avait par sa faute perdu le dernier membre de sa famille.

Les rayons du soleil commençaient à traverser la fenêtre et Arya n'ouvrait toujours pas les yeux, le guérisseur ronflait doucement sur son rocking-chair. Abattu, Osthato se blotti contre Arya et s'endormit sur son épaule pour profiter de ses derniers instants.

Un rayon de soleil espiègle lui chatouilla la joue avant de chercher son chemin vers ses yeux, lui donnant l'impression qu'elle se trouvait sous une pluie d'or. Les yeux fermés, elle se laissa doucement remonter du someil en écoutant le bruit rassurant de la respiration régulière d'Osthato, ponctué par de petits ronflements. Le Du Weldenvarden était déjà bien éveillé, et de dehors parvenaient les bruits qui avaient bercés son enfance; ceux de la forêt, harmonieuse et pleine de vie à la fois. Arya avait chaud. Bien chaud, même presque trop chaud. Son corps se battait encore contre le poison, mais la fleur d'arc-en-ciel avait déjà beaucoup amélioré son état. Elle pouvait presque sentir le liquide perfide tenter de reprendre le dessus, trop affaibli cependant pour pouvoir lui causer du mal. Ayant eu besoin de toute son énergie pour se rétablir, l'Elfe ne pouvait que rester couchée, immobile, pendant que le soleil brûlait impitoyablement sur ses lèvres désechées. Il lui fallait de l'eau. Elle avisa un pichet posé sur la table, trop loin d'elle. Inutile de réveiller Osthato, il avait besoin de se reposer. Leur affrontement avec Murtagh les avait épuisé tous les deux, autant moralement que physiquement. Brusquement, une pensée désagréable lui traversa l'esprit. Elle se leva, vite, trop vite, pour retomber aussitôt sur Osthato.

Hey... marmona-t-il d'une voix ensomeilée. Qu'est-ce que tu fais ? Et puis, comme il comprit la situation: Tu vas mieux?

Elle s'assit, soutenue par ses bras, pour se laisser retomber aussitôt à coté d'Osthato lorsque ceux-ci se mirent à trembler de façon incontrôlée.

Je suis encore trop faible. admit-elle, dépitée. Mais je pensais...

Oui ?

Murtagh est encore en liberté. Si nous ne l'arrêtons pas, il est capable de tout détruire, de tuer arbres, hommes et animaux, de saccager nos villes. Il faut à tout prix le retenir avant qu'il ne soit trop tard...

L'émotion l'empêcha de continuer.

J'y cours tout de suite annonça Osthato, une détermination qu'elle ne connaissait que trop bien brillant dangereusement dans ses yeux. Il va me le payer...

Non ! Je ne veux pas que tu partes. C'est trop dangereux. Galbatorix lui a enseigné une magie trop noire pour être vue par la lumière du soleil. Il est beaucoup plus fort que nous. Il faut prévenir ma mè....la reine, envoyer le plus de magiciens possible.

Arya le vit hésiter, partagé entre désir de vengeance et logique.Elle posa une main sur son bras, et lui dit doucement:

Tu m'as sauvé la vie...une fois de plus. Je n'oublierais pas. Mais je ne pourrai pas sauver la tienne si tu pars affronter Murtagh, vautré dans la haine, l'impulsivité et les remords. Ce n'est pas de ta faute si ton frère est mort, pas de ta faute non plus si Murtagh m'a blessée. Sois raisonable, Osthato. S'il te plaît.